Le hasard fait bien les choses ~ (PV Rosalie Brighton)

Matthew était encore pied à terre. Il ne désespérait pas de trouver un bateau pour autant. Toujours optimiste, il profitait du fait qu'il soit à Kingston pour se faire plaisir, revoir ses connaissances, tout ce qu'il ne pouvait faire en navire.

Ce soir là, il avait décidé de prendre un peu l'air avant d'aller boire un coup à la taverne. Il se promenait tranquillement dans les ruelles de la ville. Il n'était pas loin des quais. Il entendait l'eau s'écraser contre le mur qui montrait l'espace à partir duquel, l'homme dominait. Personne ne pouvait dominer les océans. C'était ce que Matt appréciait le plus. Il y était vraiment libre, bien que le gouverneur se soit mit en tête de détruire les pirates. Pour notre capitaine, il était juste jaloux de cette liberté qu'il possédait. Il n'avait aucune obligation et faisait ce qu'il voulait, lui encore plus qu'un autre. Le gouverneur justement devait, par contre, s'occuper du peuple de cette ville, diriger et donner des ordres. Au final, c'était un peu comme ce que faisait Matt lorsqu'il avait son équipage, sauf que lui, son équipage avait confiance en lui et c'était réciproque, en général. Le gouverneur était beaucoup plus ...seul. Enfin, ce n'était que l'avis d'un pirate qui marchait dans la rue, les pensées divaguantes.

Errant sans but dans Kingston, il finit naturellement par tomber dans les coins 'mal famés'. Techniquement, mis à part les résidences de ces riches bourgeois, tous les quartiers pouvaient être considéré comme 'mal famé' mais ce n'était que la populace, le peuple qui y vivait. Des cris s'élevaient venant d'une taverne proche et un sourire s'étira sur les lèvres de Matt. C'était cette ambiance qu'il aimait pas celle si calculé des nobles. Il s'imagina ce que sa famille devait faire en ce moment. Ils avaient surement dîné, en silence ou en tout cas, sans discussion animée puis ils se seraient levés sans rien rangé, laissant ce travail à leur domestiques, avant d'aller dormir dans leurs grands lits. Un petit soupir s'échappa de sa bouche. Il n'aimait pas se laisser aller à la nostalgie mais cela lui arrivait de temps en temps. Il se demanda comment allait sa mère. Il aimerait bien la revoir mais il préférait éviter de débarquer à son ancien chez lui. Il pourrait y voir cet homme si détestable qui se faisait passer pour son père. Quoique l'idée de croiser le fer avec lui et de le ridiculiser était fort plaisante.

Tout seul, Matthew marchait et souriait en s'imaginant la scène lorsqu'il rentra dans quelqu'un. Une femme. Une belle femme même. Il lui fallut quelques secondes pour mettre le doigt sur ce qui le titillait : il la connaissait. Et plutôt bien même étant donné qu'il avait passé une nuit avec elle, une nuit endiablée. Il prit son petit sourire en coin charmeur.

« Rosalie, quel plaisir de revoir »

Il y avait une touche d'ironie, étant donné qu'il était parti de la chambre comme un voleur à l'aube. La comparaison est tout à fait de mise d'ailleurs vu qu'il n'avait pas payé entièrement les services de la jeune femme. Disons qu'il était un peu à court d'argent ces temps-ci alors il avait préféré disparaitre. Pour lui, vu la façon dont elle avait apprécié la nuit, ce n'était pas tellement du vol.

Toujours ce même sourire sur les lèvres, il la regardait. Allait-elle l'attaquer ? Voila qui serait amusant. Toute nostalgie venait de s'envoler. Il était à nouveau le Capitaine Kian qui ne cherchait qu'à profiter de la vie, en s'amusant.
Son épée était toujours accrochée à sa ceinture mais il ne l'utiliserait pas contre une femme qui ne se battait pas. Certes, il l'avait utilisé contre Eli mais c'était un cas à part. Elle était à demi-femme de toute façon. Il avait un poignard planqué en cas de besoin par contre bien qu'il ne comptait pas l'utiliser non plus, comment pourrait-il blesser une si belle femme ? Enfin, il n'aimait pas blesser les femmes en général. C'était un gentilhomme, surement les restes de son passé bourgeois. Il ne reniait pas tout. Certaines choses lui étaient utiles et il pouvait passer pour un pirate un peu plus...éduqué que les autres.

« Tiens, donc, regardez qui voilà... »

Dans une vague de cheveux dorés, la jeune femme se retourna, pour planter son regard de fauve dans celui du pirate. Ses yeux étaient beaucoup maquillés, démontrant ainsi, qu'elle s'apprêtait à travailler. Ses seins blancs étaient délicatement remontés, couvert à la base d'une jolie dentelle, bien mis en valeur par le corset qui affinait sa taille. Les broderies brillaient sous les flammes vacillantes des flambeaux, qui étaient accrochés au mur moisi de ses ruelles aussi humides que pourries. Les lacets étaient attachés, et balançaient sous une brise légère.

« On se promène Capitaine...? »

Un sourire séducteur étira ses lèvres charnues. Ses mains glissèrent sur les épaules de l'homme, et comme le serpent, elle lui glissa cette pomme de tentation.

« On a besoin de se distraire...? »

Elle tourna tout autour de lui, l'examinant de la tête au pieds, comme pour jauger sa valeur. Ses yeux bleus caressaient chaque parties de son corps, admirant le joli tissu -abîmé, certes- dans lequel il était habillé. Mmh. Un éclair brutal passant dans ses pupilles, soudainement rétractées. Mais sans faire de commentaire, tout en caresse, une fois derrière lui, elle passa ses mains sur ses bras, le menton sur son épaule. Sa bouche approcha de son oreille, et dans un murmure sensuel, elle prononça :

« Forban de bas-quartiers... Tu me dois encore 100£... »

Elle eut un sourire, posant ses lèvres sur son lobe pour le suçoter tout doucement, le bout de sa langue jouant habilement avec le petit morceau de chair. Le bout de ses doigts passèrent dans la nuque du pirate, tout doucement, tout délicatement... Et dans un rire, elle se détacha de Matthew, pour se planter devant lui, main sur ses hanches joliment dessinées. Elle se mordait la lèvre inférieure, aux allures provocantes, tout comme le jour où ils s'étaient envoyés en l'air... Rien qu'au souvenir de cette nuit folle, elle eut des frissons de désir : elle n'était pas un des bijoux de luxure de ce port pour rien! Et son carnet de clients ne désemplissait pas!

Matt souriait. La situation l'amusait, comme toujours. Elle se trémoussait autour de lui et cherchait à le faire tomber dans ses filets à nouveau. Elle souhaitait aussi récupérer l'argent manquant. Son petit manège finit, elle se planta face à lui. C'était à son tour de jouer, car pour le pirate, ce n'était rien d'autre qu'un jeu, pour elle, ça ne devait pas être la même chose. Il s'approcha d'elle et passa son bras autour de son bassin pour l'attirer contre lui avec fermeté mais douceur. Vu le nombre de femmes qui étaient passées dans ses bras, il commençait à avoir la main.

« Voyons, je pensais que tu m'avais fait une réduction vu comme tu avais apprécié ~ »

Il lui servit son sourire de charmeur en accompagnement, la tenant toujours contre lui avec force de sorte qu'elle ne cherche pas à s'échapper. Son autre main vint doucement lui caresser la joue. Il la séduisait autant qu'elle le séduisait. C'était pour cela qu'il considérait que c'était un jeu, un jeu de séduction en fait.

« Sinon, on peut le refaire et je te paye le tarif normal cette fois-ci ? C'est un bon deal ! Ca fait une petite réduction sur les deux du coup mais je les mérite, tu le sais ~ »

Marchandeur, le fait qu'il veuille bien payer un tarif plein devait être pris comme un compliment. Cela voulait dire qu'elle lui plaisait plus que d'autres et surtout, avait su le satisfaire. Il y avait aussi le fait que maintenant qu'il l'avait contre lui, il n'avait pas envie de la laisser s'échapper sans avoir gouter à ce fruit si délicieux.

Sa main qui caressait sa joue était descendue pour se poser dans son cou et seul son pouce se promenait sur ses lèvres. Il savait charmer aussi, il ne fallait pas le prendre pour un débutant. Il estimait que, justement, vu son niveau, il pouvait avoir une réduction. Ce n'était pas forcément l'argent qui manquait aujourd'hui, sa petite promenade aux bords des quais le matin avait été fructueuse. Ses mains baladeuses attrapaient avec discrétion les quelques bijoux qui pendaient autour des poignets ou des cous des riches femmes.

Il finit par doucement la relâcher un peu sans pour autant la laisser s'échapper et il fouilla dans sa poche.

« Ou alors, j'ai mieux, que dirais-tu d'un beau collier et on est quitte­ ? ~ »

Il sourit. C'était un beau collier en effet mais il ne valait surement pas les £100 plus le prix d'une éventuelle aventure supplémentaire ce soir. Arnaqueur ? Non, il essayait juste de faire plaisir à tout le monde. Il savait qu'elle avait aimé cette nuit. Ces cris en avaient dit long alors une nouvelle nuit la tentait surement. Il misait là dessus et espérait ne pas miser sur le mauvais cheval. Au pire, il improviserait. Comme il le faisait toujours et comme il le faisait maintenant.

Elle se laissa aller dans ses bras, collée contre son torse, à caresser son cou, ses épaules de ses lèvres... Elle s’enivrait de son parfum d'homme... et sa langue passa doucement sur sa peau salée... Son coeur battait à une allure folle, lui rappelant les plaisirs dont ils s'étaient damnés l'autre nuit....

« Tu sais que je ne fais jamais de réduction... »

Quand elle vit le bijoux, Rosaline le lui prit brusquement d'entre les mains. Elle lui tourna le dos et lentement, le fit glisser entre ses doigts, l'examinant avec précision : il y avait quelques éraflures, légers sillons d'un cou un peu gras où d'autres pierreries avaient dû être entassées avec. Elle passa ses doigts fins sur l'or de la chaine, et gratta un peu, remarquant alors que la peinture s'enlevait un peu. La jeune femme leva un sourcil, pas très convaincue de la valeur de ce bijou. Par contre, les pierres semblaient véritable ou du moins, semi-précieuse. Une aigue-marine si bien polie qu'on aurait dit du diamant... Chaque dentelle d'étain était soigneusement travaillée, dorée. Un bijoux de valeur, mais pas assez pour rembourser ce qu'il lui devait. Elle tourna son visage d'enfant vers lui et lui lança, sur un ton un peu réprobateur :

« Je ne peux tirer que 65£ avec ça... Il m'en manque encore 35£. »

La prostituée planta son regard dans le sien, effrontée. Il essayait de l'arnaquer. Il lui devait de l'argent, elle ne le laisserai certainement pas partir comme ça. Si elle commençait à faire des fleurs à des clients, elle ne s'en sortirait pas et perdrait beaucoup d'argent. Mais en même temps... Ce n'était pas n'importe qui... Un homme aussi doué de ses dix doigts que de son troisième bras.. Elle joua un instant avec l'une de ses mèches de cheveux, qu'elle entortillait autour de son doigt et finit par lâcher

« Va pour une nuit plein tarif mais je veux autre chose pour compenser. Et pas cette camelote! »

Dans un mouvement un peu contrarié, elle balança le collier par terre, aux pieds du capitaine.

« Oh... Oui... Contre le mur... » disait elle dans un soupir conquis

Son dos blanc était collé contre les pierres froides et humides... La mousse spongieuse et verte amortissait, empêchant ainsi, toutes éraflures disgracieuses.
Dans un soubresaut, elle se laissa à lui, la tête en arrière, comme une femme qui se donne. Les yeux mi-clos, les lèvres entr'ouvertes, elle s'apprêtait à recevoir ce baiser, les bras forts du capitaine autour d'elle. L'air semblait s'être rafraîchit mais son corps bouillonnait de désir. Elle voulut passer ses bras autour de son cou, pour le coller davantage à elle, mais voilà qu'il s'écartait. Intriguée, voir un peu contrariée, elle ouvrit ses yeux et découvrit alors cet... individu. D'une grimace dégoûtée, elle se glissa contre le dos de son capitaine. Le dégoût prit des allures d'horreur quand il la réclama.

« Premier arrivé, premier servi il me semble. »

De suite, la prostituée réagit, vivement

« Oui! Ne le laisse pas faire...! »

Elle dissimula son visage dans ses omoplates, ses cheveux sur ses joues... Ses mains étaient posées à plat contre ses épaules, les yeux fermées, elle se protégeait de l'ivrogne, qui ne semblait pas en avoir finit. Elle sentit Matthew bouger ou esquiver, sûrement un coup ou une arme. Alors, pour ne pas le gêner, Rosaline se détacha de lui, admirant le charisme et la force évidente du capitaine.

L'homme titubait, soudain perplexe. Mais bien vite, réalisant que son attentat fut vain, il chargea, dans des grognements et cris tout à fait incompréhensibles. Seules les insultes semblaient correspondre à quelque chose d'à peu près articulé

« Fils de catin... Va te faire chez la tantine du diable... Tête d'âne... ! »